J'ai lu la gamme Hawkmoon

Publié le par Arii Stef

Hawkmoon est un jeu de rôle américain dont l’univers prend place dans celui de la saga de romans de Michael Moorcock. Elle narre les aventures du Duc Dorian Hawkmoon dans le monde du Tragique millénaire. Ce monde est notre terre des siècles après un cataclysme qui a détruit la civilisation. L’Europe du tragique Millénaire est morcelée en royaumes, principautés, cités-libres et duchés. La technologie y est médiévale, mais les ruines de l’ancien temps affleurent partout, avec ses zones irradiées ou soumises à des phénomènes incompréhensibles, les mutants sont nombreux et certains savants arrivent à comprendre en partie la technologie d’antan et à créer des objets extraordinaires. L’Europe est confrontée à l’invasion barbare des terribles Granbretons organisés en ordres guerriers, menés par un empereur dément et dotés d’une science très en avance sur les autres pays. Les romans racontent la résistance de Hawkmoon et de ses amis. Le jeu édité par Chaosium dans les années 80 sur la base du système Basic comme Stormbringer est resté assez confidentiel dans les pays anglo-saxons mais il a connu un grand succès en France. Il a connu deux éditions chez Oriflam et de très nombreux suppléments de création française. Une troisième édition a vu le jour chez Mangoose Publishing puis un nouveau jeu, sans rapport avec le Basic System, a été sorti par le Département des Sombres Projets.

J’ai acheté Hawkmoon 1ère édition française à sa sortie chez Oriflam. J’étais adolescent. J’avais lu les romans que j’avais aimé. J’avais mené quelques scénarios dont un de ma création. L’univers me fascinait car il était une image déformée de notre Europe, un hybride étrange de médiéval-fantastique, avec de la technologie et des mutants. Les méchants iconiques, les Granbretons, sont vraiment marquants avec leur masque de bête et leur société démente. Néanmoins, les parties furent peu nombreuses et j’achetai uniquement quelques suppléments. Je suis passé totalement à côté de la deuxième édition des années 90. J’ai tenté de lancer une campagne dans les années 2000 mais nous abandonnâmes au bout de quelques parties. Est-ce du fait du simple hasard si j’y ai si peu joué ? Est-ce à cause du système Chaosium dont la mortalité s’accommode mal d’un monde très dangereux en mode campagne ? Où est-ce l’univers qui, plaisant à la lecture, était moins favorable au jeu ? Je n’ai pas la réponse à ces interrogations et je ne désespère pas de lancer une vraie campagne dans cet univers.

J’ai relu les romans dans les années 2010, je les trouvés incroyablement mauvais. Moorcock a un talent pour brosser un monde et démarrer une intrigue mais la suite est vraiment bâclée et la fin inepte. J’ai conservé néanmoins un attachement pour la gamme jeu de rôle et pour l’univers. J’ai acquis d’occasion des suppléments que je n’avais pas à l’époque, notamment de la deuxième édition. Je les lis de temps à autres, je vous propose donc de centraliser dans cet article mes retours de lecture sur ces différents ouvrages.

1ère édition française : l'île brisée.

2ème édition : Livre de base - Le seigneur des sans masque.

 

L’île Brisée, 1989, Traduction et adaptation par Eric Simon (nombreux auteurs américains), campagne

J’avoue que même si l’île brisée jouit d’une bonne réputation, je ne m’attendais à rien de spécial. La campagne démarre étrangement car de nombreuses introductions sont proposées, y compris pour des personnages de Stormbringer. En fait, c’est assez normal car ce n’est qu’un prétexte : dès le début du scénario, les personnages sont naufragés sur une étrange et gigantesque pyramide où règne une race mutante et impitoyable (les Goules des Mers). Jouet du Destin et du roi de ce lieu improbable, l’enjeu de la première partie de la campagne sera pour eux de s’échapper de la pyramide.

La deuxième partie a pour cadre l’Eire tout entière. Les personnages auront fort à faire : entre un ordre granbreton rebelle, les forces d’occupation, les serviteurs du Bâton runique et les machinations d’un Sorcier du Chaos qui dispose d’une secte à son service. Ce sorcier œuvre à l’implantation du chaos dans le monde du Tragique Millénaire et les personnages se révèlent être irrémédiablement liés à lui. Même si çà et là, on trouve des archaïsmes ludiques, la campagne est extraordinairement intéressante dans sa construction et sa liberté de déroulement. L’intrigue puise dans le multivers, elle est un peu tirée par les cheveux mais elle met les personnages réellement au centre du jeu. J’aime beaucoup aussi ce portrait un peu hallucinatoire d’une île malmenée par des envahisseurs et des puissances démentes avec au milieu des gens qui essaient de vivre presque normalement. Apocalypse Now peut aller se recoucher ! J’ai trouvé que cette campagne est une belle réussite, elle m’a vraiment donné l’envie de la maîtriser…

Hawkmoon nouvelle édition, 1996, auteur principal : Olivier Saraja, livre de base

Cet ouvrage est la deuxième édition française du jeu. Elle est parue en 1996. C’est une création française sur la base de la première édition. Je ne disposais que de la première édition en boîte et ne connaissais pas cette édition avant 2023. Côté matériel, elle se présente en un livre unique blanc dont le style sera repris pour tous les suppléments de la deuxième édition. D’extérieur, je ne suis pas fan de l’illustration mais le livre semble de loin plutôt de bonne facture en termes de fabrication et de style. Je déchante vite : la reliure semble fragile (peut être mon exemplaire uniquement) et surtout c’est en fait ultra-moche. La charte graphique qui utilise des fonds verts au goût douteux pique les yeux et les illustrations sont très inégales. Ca a très mal vieilli.

Côté règles, la première édition était la version la plus dépouillé du BRP que je connaissais. Cette NE (nouvelle édition) apporte quelques complexifications mais on reste dans la simplicité. Ce sont surtout les règles liées à la science qui ont changé par rapport à la première édition. Je les ai survolées, je n’en dirais rien mais j’ai bien remarqué que les « sorciers » pas trop intelligents doivent oublier des secrets technologiques pour en apprendre de nouveaux (wtf !). La création de personnage a l’air plus équilibré que dans la première édition mais les caractéristiques sont toujours tirées aux dés à l’ancienne.

J’ai vraiment trouvé la présentation du monde bien faite. J’ai notamment apprécié le fait de fournir toute la chronologie des conquêtes granbretonnes et de proposer de jouer avant, pendant ou après la conquête. Les auteurs précisent également leur perception des aventures dans ce monde et la place du bâton runique (avec des règles associées à une potentielle affiliation des aventuriers à cette force cosmique). Un tour d’horizon géographique des nations européennes et du reste du monde est fourni. Néanmoins, il manque peut-être une description plus poussée d’un lieu de démarrage pour les aventuriers. Il faut dire que la gamme n’en manque pas. Le jeu inclut un résumé des romans (bonne initiative pour ceux qui n’ont pas envie de les lire ou de les relire).

Le jeu propose un scénario «L’expédition Stanerson ». Sur un canevas très simple, celui de la recherche d’une expédition archéologique dans la Forêt Noire territoire des mutants, ce scénario nous fait entrer de plein pied dans l’univers d’Hawkmoon : des objets scientifiques dangereux, des mutants et de méchants et fourbes granbretons… Je le trouve vraiment honnête, peut être un poil trop mortel, mais avec des moments vraiment épiques.

Le Seigneur des Sans Masques (1997), Auteurs : Olivier Durand et Olivier Saraja, scénarios

Ce recueil de scénarios par Olivier Durand et Olivier Saraja est paru en 1997. Je pensais qu’il s’agissait d’une campagne. Que nenni : on y trouve quatre scénarios indépendants dont le dernier requiert des personnages granbretons. Les trois premiers scénarios sont assez fantastiques et relativement indépendants de la conquête granbretonne. Dans la « Cité volante de Perth », les personnages pourront explorer une cité volante victime d’une étrange malédiction. C’est un étrange prisonnier amnésique hollandien qu’ils rencontreront dans « Un Eden en Dehors du Temps » en pleine occupation du pays. Ils devront empêcher les granbretons d’utiliser son invention, une sphère-monde que les seigneurs masqués comptent utiliser pour déplacer facilement leurs troupes. Ils y rencontreront un certain duc de Köln.  Dans « Une Erreur de Jeunesse », un conflit ancien entre une secte de sorciers et un ordre de chevalerie renaît de ses cendres. Dans le dernier scénario, il s’agit pour des personnages granbretons d’infiltrer les Sans Masques pour déjouer un complot contre l’Empereur-Dieu. J’ai plutôt aimé ces scénarios dont les intrigues m’ont paru séduisantes, recelant notamment des surprises dans les situations et le déroulement. J’ai moins aimé la rédaction, trop délayée, trop détaillée à mon goût. On trouve aussi quelques manœuvres scénaristiques datées (ah Orland Fank constamment sur les bottes des PJs dans un des scénarios). Les illustrations et la mise en page sont un peu d’un autre temps comme les adresses internet, ça fait partie du charme.

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