J'ai testé pour vous : Polaris de Ben Lehman

Publié le par Arii Stef

Après avoir lu Polaris de Ben Lehman, je l’ai enfin testé à l’occasion d’une soirée one-shot du club. Pour rappel, ce jeu dont le monde tragique n’est qu’esquissé dans le livre, a la particularité de se jouer à 4 joueurs sans maître de jeu. Chaque joueur crée un personnage qu’il joue à tour de rôle, il prend alors le poste du Cœur. Le joueur placé en face de lui conduit l’adversité et joue les adversaires du Cœur, ce rôle est appelé le Mépris. Les autres joueurs interprètent les relations du Cœur, qu’elles soient personnelles ou hiérarchiques. Elles ont le rôle des « Lunes ».

Les personnages ont tous au départ les mêmes caractéristiques chiffrées (zèle, feu et glace). Ce qui les différencient est d’une part leur cosmos (leurs relations) et d’autre part leurs aspects (objets, fonctions ou encore événements passés).

Le récit se construit sur un dialogue mais quand le cœur ou le mépris ne sont plus d’accord, on entre dans une phase de résolution de conflit qui utilise des « phrases clés » et un dé à 6 faces. Les phrases clés que nous avons le plus utilisés furent « Mais seulement si… », « Vous en demandez trop » et « Il n’en sera rien ». Cette dernière phrase provoque la résolution par lancer de dé mais désavantage celui qu’il l’a prononcée (ajout ou non du "zèle").

Nous avons donc créé les personnages. La création fut plutôt rapide. C’est censé être assez libre mais il faut quand même lire la description des différents « aspects » proposés (exemples : « Matriarche des Yildun » ou « Etzlitotec, princesse du printemps »). Ce n'est pas qu’il soit obligatoire de choisir dans la liste proposée mais ces aspects posent bien l’ambiance du jeu et donnent aux joueurs des idées de direction par leur côté évocateur. Les aspects servent à activer certaines phrases comme « vous en demandez bien trop ».

Ensuite, il faut démarrer. Et là les difficultés commencent, malgré le cosmos du Coeur, le premier Mépris (moi en l’occurrence) a quelques difficultés à trouver des idées. Le chevalier Skat se retrouve à un bal d’été et son ancien compagnon d’arme a un regard étrange. Est-il possédé ? Autre difficulté, il faut se défaire de ses habitudes de MJ, il ne faut pas laisser l’action en suspens pour laisser la main au joueur. Il faut décrire le résultat de l’action et l’autre joueur indique son accord, son désaccord ou pose des conditions avec les fameuses phrases clés. Par exemple, on ne dit pas «  ta sœur se précipite vers ton compagnon possédé afin de l’empêcher de te frapper ; que fais-tu ? ». Le Mépris dira, ta sœur se précipite vers ton compagnon possédé qui s’apprêtait à te frapper et lui plante un poignard dans la poitrine. Cela permet ensuite au Cœur de donner son accord en poursuivant le récit, de poser une condition (exemple : « si et seulement si » le poignard ne touche pas une zone vitale) ou d’inviter le Mépris à proposer un récit moins extrême « vous en demandez bien trop ». Autant dire que cette façon de décrire n’est pas naturelle pour de vieux rôlistes, les moins expérimentés (ma fille notamment) s’en sortent mieux.

La principale difficulté du jeu ne vient pas à mon humble avis du partage de la narration mais de la capacité à improviser. J’ai trouvé que le premier échange entre un Coeur et son Mépris était le plus compliqué, le suivant s'est nourri du récit du premier échange, voire des péripéties des autres Cœurs.

Je trouve qu’il manque de guides sur des événements ou des sujets de conflit comme le sont les cartes et les tables aléatoires d’Oltréé. Il manque un petit quelque chose pour favoriser l’improvisation, le cosmos et les aspects me semblent un peu justes pour aider à fabriquer le récit.

Le fait que le monde soit à peine esquissé a un peu gêné certains joueurs : pas de cartes sur lequel s’accrocher, rien de précis, le monde se construit sur quelques bases par les échanges entre joueurs. Déroutant pour certains…

Voici les grandes lignes du récit ainsi construit :

Il y a bien longtemps les gens mouraient à l'extrémité du monde. Mais tout espoir n'était pas encore perdu car Pegasus, Al-na'ir, Skat et Vega entendaient toujours le chant des étoiles. 

C'est ainsi que 4 chevaliers de l'ordre stellaire ont défendu les vestiges de la cité de Polaris de la Méprise.

Skat a exorcisé l'un de ses compagnons chevaliers mais sa soeur chérie se verra possédée. Il empêchera ensuite un employé de son musée de vendre une toile magnifique de l'époque de la nuit éternelle contre une machine. Malheureusement, cette machine censée produire des pièces de platine tombera dans les mains de jeunes écuyers qui détruiront plusieurs palais en l'actionnant.

Vega (ma fille) a poursuivi Mensa, un ancien chevalier devenu démon. Ce dernier s'était infiltré dans Polaris et avait enlevé Kuma, le fiancé de Vega. Elle parvint à le libérer non sans le blesser mais dut suivre Mensah jusqu'au temple perdu où s'était réuni une cohorte de démons. Avec ses compagnons de combat, elle vainquit les démons.

Al-Na'ir (moi) eut la surprise de trouver son ennemi le sénateur Melandos au palais de sa bien-aimée. Il le mit dehors sans ménagement et celui-ci fit intervenir son escorte. L'un des gardes se révéla être un démon qu'al-Na'ir décapita. Mais dans l'empoignade, sa bien-aîmé perdit ses yeux. Melandos mit Al-na'ir en prison. Le sénat souhaitait le condamner à mort mais le jugement fut remis à l'été suivant. Al-na'ir appela à la rescousse Etzlitotec, princesse du printemps, un démon qu'il avait croisé par le passé.

Pegasus peut à sauver le sénateur Altaïr des griffes du démon Chamaeleon qui avait pris l'apparence du frère jumeau de Pegasus. Il fut mis sur la piste par la délicieuse Nashira qui malheureusement perdit la vie dans le combat final qui verra le démons s'échapper et le sénateur libérer.

Mais tout ça eut lieu il y a fort longtemps et personne ne s'en souvient.

En conclusion, je dirais que j’ai bien aimé la partie mais je ne suis pas totalement conquis. Le jeu se caractérise par trois aspects : la narration partagée, un monde en partie co-construit et l’improvisation. J’ai aimé le partage de la narration, un peu moins le fait d’avoir un monde à moitié construit. Je trouve par contre que le jeu manque de mécaniques pour favoriser l’improvisation. J’essaierai peut-être sur deux séances pour voir ce que ça donne. Il est à noter que ma fille qui joue très peu a préféré largement cette expérience à celle du jeu de rôle traditionnel. Elle a trouvé qu’elle était beaucoup plus active qu’en tant que joueur que dans une partie classique. Le partage de narration ne serait-il donc pas qu’une mode passagère ?

 

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