J'ai lu : Les Héritiers
Présentation
Les Héritiers est un jeu de rôle paru en 2021. Il prend pour cadre la Belle Epoque vers 1900. Les personnages sont des fées qui prennent l’apparence d’humains. Le monde féérique est caché des humains et obéit à ses propres règles. Le jeu est un projet ancien porté par Isabelle Périer, l’une des fondatrices des éditions Département des Sombres Projets, décédée en 2017. Ses amis et associés ont décidé de mener le projet jusqu’à son terme afin de lui rendre hommage.
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Je suis un grand fan des romans de Pevel « Le Paris des Merveilles ». J’aime ce mélange de début de la modernité et de féérie. L’univers des Héritiers se rapproche beaucoup de celui de Pevel et j’avais très envie de le découvrir pour, pourquoi pas, lancer une campagne.
L’univers
Les joueurs incarnent des Faux-Semblants, des êtres féériques mêlés aux humains qui adoptent en société une apparence humaine. Ils disposent de pouvoirs féériques propres à leur race. Certains vivent parmi les humains, leur nature féérique enfouie. Les fées rejettent pour la plupart le christianisme qui les a pourchassées et respectent la religion druidique de leurs ancêtres. Le secret est imposé à tous pour se protéger des humains. Le monde des fées n’est cependant pas un long fleuve tranquille, il est déchiré entre la Monarchie traditionnelle et les Communautés inspirées par la Révolution Française chez les humains. Des nouvelles fées sont apparues dans les dernières décennies comme la fée électricité alors que le progrès scientifique transforme la société des humains. Certains Faux-semblants reçoivent depuis peu des visions d’une grande guerre et d’apocalypse avec la date de 1914. Ils se nomment les Héritiers.
J’apprécie ce postulat avec cette notion de société secrète et parallèle des fées. Malgré tout, je dois dire que c’est peu original (La Mascarade !). Le passage entre masque et forme féérique (et le corps qui redevient féérique à la mort, etc…), l’existence des druides, le côté visible de la magie, tout ça rend peu crédible pour moi le secret entretenu sur l’existence des fées. Finalement, je préfère le Postulat des romans de Pierre Pevel (les fées se sont révélées depuis l’Arcadie) avec une société plus fantastique mais sans notion de secret.
L’histoire des fées et de leur société est détaillée dans le livre, notamment dans l’optique d’expliquer les factions actuelles. C’est riche et mouvementé. La structure féodale de leur société et un jeu de factions bien tordu permettent des scénarios politiques. Malheureusement, je n’ai pas accroché plus que ça.
La Belle Epoque côté humains est également décrite dans le jeu. Je trouve la présentation particulièrement bien faite avec de nombreux détails utiles à l’immersion dans l’époque.
Enfin, le concept de visions apocalyptiques et d’héritiers permet d’introduire un objectif au jeu et un lien pour les personnages des joueurs. Son origine et la clé du secret sont expliquées dans le livre de base, ce que j’apprécie. Mais là encore, j’ai des réserves : ce métaplot ne me plaît pas plus que ça et je trouve la ficelle un peu grosse.
Les personnages
Les types de fée sont très nombreux et divers : des traditionnels elfes, gnomes, korrigans et farfadets aux plus originaux vampyrs, léporides, phénix ou fées de métal. J’en ai compté 25 au total dans le livre de base. J’apprécie cette diversité qui permet une belle variété de rôles et de pouvoirs pour les joueurs. Néanmoins, cette diversité donne parfois un effet « zoo » et certains types de fées pourraient sembler difficiles à incarner à certains.
Il faudra aussi choisir sa faction entre partisan de la Monarchie ou l’une des « Communautés » qui contestent cet ordre établi. Le statut d’Héritier permettra de réunir des personnages de factions différentes dans le même groupe. Cela me paraît néanmoins assez artificiel pour souder un groupe, il faudra je pense trouver en commun un bon concept de groupe.
Ce qui caractérise les personnages sont surtout leurs pouvoirs : là encore on va du très traditionnel (caméléon, course fulgurante, terreur…) à de plus originaux (absorption sexuelle, bond prodigieux…). Quand le score de féerie du personnage évolue, il peut acquérir des pouvoirs plus puissants et plus féériques.
Le système
Le système utilisé pour Les Héritiers est proche du CYD (Choose your Dice), celui de Mournblade et Hawkmoon. Il s’agit d’une variante appelée 3D, cette fois, l’échelle des dés est plus réduite. La base du système est simple, le joueur lance 1 dé et y ajoute le score de la compétence et celui de la caractéristique du personnage ; pour réussir l’action, il est nécessaire d’atteindre le seuil de difficulté (10 étant la difficulté standard) ou surpasser le score de l’adversaire. Le joueur a le choix de lancer 1d8 (prudent), 1D10 (aventureux) ou un 1D12 (panache). Sur le D10, le 1 vaut -3, sur le D12, le 1 et le 2 valent -5.
Le système par ailleurs est très traditionnel avec un nombre de compétences assez important (24 en tout), des pouvoirs décrits, des bonus et malus de circonstances…
Conclusion
J’ai un sentiment très partagé sur ce jeu. Alors précisons, quand je dis « partagé », cela ne veut pas dire « mi-figue, mi-raisin », cela signifie qu’il y a des trucs que j’adore et d’autres qui ne passent pas. Je ne parlerai pas du système, j’ai toujours beaucoup de mal à les apprécier sans les avoir pratiqué. Disons qu’il est touffu et old-school mais il reste dans ce que je suis capable de gérer. Revenons donc aux points que j’ai apprécié au plus haut point. J’aime beaucoup le thème général, le fait de jouer une fée à la Belle Epoque, la variété possible des personnages, le fait que les fées sont à la fois fée et humaine, et cette société secrète qui cohabite avec l’humanité. C’est vraiment ce que j’attendais et qui me semble le sel du jeu.
En revanche, il y a deux points qui me déplaisent et que j’ai du mal à concevoir. La première, c’est le rôle même d’héritiers, ces visions et ce message que « 1914, c’est la fin ». Je trouve la ficelle un peu grosse, pas crédible, elle ne me plaît pas. Comme c’est un élément essentiel du jeu c’est très gênant. L’autre point qui me dérange est l’organisation de la société féérique et son histoire. Je n’arrive pas à y croire. Elles me paraissent très artificielles et finalement peu fertiles en intrigues. Difficile de dire pourquoi et comment, c’est plus un ressenti.
Alors vais-je y jouer ? C’est probable que je le teste en one-shot pour me faire une idée. Je vais en attendant lire le reste de la gamme. Cela lèvera peut-être ce sentiment.