J'ai testé pour vous : Rétrofutur
J’avais relu récemment un jeu paru et acheté en 2002, Rétrofutur. Ce jeu français écrit par un collectif d’auteurs français de renom propose un univers uchronique de science-fiction se déroulant en 1952. Il est très inspiré des œuvres de Philip K.Dick. Les mécaniques du jeu étaient très novatrices pour l’époque avec notamment une absence de chiffre sur la feuille de personnage. Je vous laisse lire mon retour de lecture pour plus d’informations. Je souhaitais tester le jeu afin de mettre à l’épreuve mes sentiments de lecture. C’est ce que j’ai fait récemment à l’occasion d’une soirée One-Shoggoth (one-shot) de mon club de Blagnac. 4 joueurs se sont montrés intéressés. Nous avons joué le scénario du livre de base « Invasion Grille-Pain » dans le contexte du secteur de « Paradis Perdu ». J’ai utilisé les prétirés fournis dans le chapitre création de personnage du livre de base. Je me suis retrouvé avec une Agente non-A de l’Agence de l’Hygiène Mentale, un terroriste du Bugnus, un chasseur de cafard et une artiste paumée.
Univers
La présentation de l’univers a été assez rapide, je dirais 15 minutes. Il y avait deux amateurs de Philip K.Dick à la table qui ont rapidement saisi les références et le ton. Je n’ai pas eu l’impression que pour les autres l’univers ait été difficile à appréhender. L’originalité est bien là mais la complexité à décrire, se représenter et s’immerger ne m’a pas semblé insurmontable, bien au contraire.
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Le côté bureaucratique, les Etrangers, l’irruption du surnaturel et même les mafiosi sont des thèmes qui ont bien fonctionné je trouve. La première utilisation d’un pouvoir par la Non-A du Groupe ou le discours du nouveau chef de la mafia via le photofluide ont fait leur petit effet. En revanche comme je le craignais, le thème de la Résistance a été plus difficile à mettre en place : d’une part du fait du scénario et des prétirés (on y reviendra), mais aussi du fait que le thème n’est pas à mon avis pas bien défini et circonscrit dans le jeu. Résistance à quoi, dans quel but, avec quels contacts : le jeu manque de précisions et de mécanismes de création associés à ce thème. Les joueurs ne sont pas sentis concernés et les personnages étaient à deux doigts de se trahir les uns les autres.
Système
A la lecture, j’avais trouvé que le système représentait une tentative ratée de simplicité et d’absence de caractéristiques et compétences chiffrées. Je maintiens totalement ce constat après ce test.
En sus, les tests se résument finalement dans 90% des cas à faire moins de 3, 5 ou 7 sur un D10. Pas fun. Autre biais, en privilégiant les domaines aux compétences et manœuvres, on assiste à un concours de mauvaise foi pour appliquer les domaines ou au contraire de se retrouver avec un personnage qui manifestement devrait être doué ne pas l’être tant que ça.
De leur côté, les joueurs ont trouvé la mécanique de test insipide.
En revanche, ce qui a emporté l’adhésion de tous, c’est le système d’Ubik et de substance-mort qui mesure la montée de l’angoisse et du surnaturel, vraiment ludique et intéressant.
Scénario
On est vraiment loin des kits d’initiation modernes. Les pré-tirés ne sont pas prévus pour le scénario. J’ai dû trouver des explications à la présence des uns et des autres à Paradis. Pour mettre un semblant de liens entre eux, j’ai fait un tour de table où chaque joueur expliquait comment il avait fait la connaissance d’un autre des protagonistes.
Le scénario prévoit une situation initiale : un secteur modèle est privatisé (il est en fait revendu à la mafia) et une intrigue concernant directement les personnages, un grille-pain doué de conscience se réfugie chez l’un d’eux. Là encore, le déroulement a confirmé mes impressions de lecture. Tout d’abord, en mettant d’emblée les personnages dans une situation anormale où les Agences perdent la main, les joueurs se retrouvent frustrés de ne pas vivre la « vraie » ambiance bureaucratique du jeu. Ensuite, le thème de la Résistance ne s’impose pas de soi. Les joueurs n’ont pas ressenti ce thème pourtant central dans le scénario. En revanche, ils ont beaucoup aimé l’intervention du surnaturel par le grille-pain. L’aspect cocasse et absurde de cette situation a bien fonctionné.
Conclusion
Nous avons fait un débriefing après la partie. Les conclusions des joueurs étaient assez proches des miennes. L’univers a été dans l’ensemble bien apprécié ainsi que l’intrigue du Grille-pain. En revanche, le fait que le système « normal » dirigé par les Agences soient mises en cause dans un scénario d’introduction a paru bizarre et même dommageable aux joueurs. Ils auraient préféré être confrontés à l’absurdité administrative qu’à la prise de pouvoir des mafiosi. Côté système, il leur a paru sans saveur et dispensable sans être non plus rédhibitoire. Ils ont aimé l’ubik et ont beaucoup relancé les dés.
Malgré mes réserves, je pense que le jeu a beaucoup de potentiel. Je vais continuer à lire la gamme et vous faire des retours dans le blog. Je tenterai peut-être un autre test avec un autre scénario.