Légendes Tahitiennes : la société maohie
Paraita et ses guerriers venaient de faire fuire leurs ennemis de la chefferie voisine de Tiarei. Avec grande satisfaction, Paraita se regarda dans les eaux du petit lac de Vinitea. Il contemplait sa grande taille, son teint clair et ses nombreux tatouages. Il avait fière allure. Il se glorifiait d’être un ari’i, un descendant de la femme Hina-nui-faahara-ma’au et du dieu Ro’o. Ses compagnons plébéiens avaient la peau plus noire et il surpassait le plus grand d’entre eux d’au moins une demi-tête. Ils étaient des Manahune, des fils de Ti’i, le premier homme et de Hina, la première femme; aucun sang divin ne coulait donc dans leur veine. Les deux porteurs de Paraita le prirent sur leurs épaules. Eux avaient à la fois du sang ari’i et du sang manahune, ils étaient donc Ra’atira et avaient l’immense honneur de porter Paraita quand celui-ci se déplaçait. De sa hauteur, Paraita contempla les prisonniers qu’il avait fait. Il se dit qu’ils avaient beaucoup de chance que Ro’o, son dieu protecteur, n’acceptât pas les sacrifices humains. De nombreux autres dieux se seraient repus de ces prisonniers. Ils deviendraient les esclaves des vainqueurs. Ils seraient des Titi.
La vision classique des îles du Pacifique Sud véhicule l’image d'une vie paradisiaque libérée de toute contrainte morale et matérielle. La réalité diffère quelque peu de ce mythe : la vie, voire la survie, est particulièrement difficile à assurer. Les îles coralliennes par exemple ne disposent de ressources alimentaires disponibles qu’en quantité limitée. Si la liberté sexuelle qui a frappé les premiers explorateurs est bien réelle, la société tahitienne est assez rigide et le poids des Dieux et des princes se fait sentir. Mais
La société des maohis est caractérisée par sa hiérarchisation. De multiples catégories et divisions positionnent les Hommes les uns par rapport aux autres : la classe, le sexe, la famille et les divisions politiques sont les principaux éléments qui permettent aux Maohis de se situer dans le groupe.

La société maohie est une société de classes. Leur dénombrement n’est pas aisé et varie selon la finesse de l’analyse. Les grands principes sont les suivants : des chefs héréditaires, les ari'i, dominent une classe laborieuse, les manahune, avec l'appui des prêtres, les tahu'a, et le soutien des petits nobles, les ra'atira. C'est la naissance et non les compétences qui déterminent avant tout le rang d'une personne. Cependant, les artisans (ou spécialistes), quel que soit leur caste, bénéficient d’une considération particulière. A côté de ce schéma rigide existe une société de baladins, les 'arioi, à laquelle on peut appartenir indifféremment du rang social.
Les chefs : les Ari’i
Les ari'i (chefs, nobles ou princes) dominent la société, ils tirent leur prestige et leur légitimité de leur généalogie qui remonte jusqu'aux Dieux. Des conflits entre chefs se terminent parfois simplement quand le héraut d'un chef montre à l'autre que son chef est issu d’une plus haute lignée. L'essence divine des chefs les différencie tellement du reste de la société que, dans les mythes maohis, la genèse des chefs est différente de celle du commun des mortels : les ari’i descendent directement des dieux !
La classe des chefs n'est elle-même pas homogène. Le rang d’aînesse et le prestige du lignage de chaque famille insinuent de nombreuses différenciations entre les membres de la classe noble. On appelle les ari'i régnants et leur famille directe les ari'i maro 'ura (noble à la ceinture rouge), la ceinture rouge étant l'insigne de la royauté. Les ari’i maro’ura règnent sur plusieurs mataiena’a (chefferie correspondant à une vallée ou une île) qui dispose chacun d’un chef, appelé ari’i nui ou ari’i rahi. Les ari'i ri'i constituent le reste de la classe des ari'i.
Les ari'i sont tellement sacrés (ra’a) que leur contact avec des choses non sacrées (noa) peut être dangereux. Le degré de sacralisation de l’ari’i maro’ura est poussé. On brûle les maisons non consacrées où l'ari'i régnant a séjourné car elles deviennent sacrées donc interdites (tabous) pour le peuple ou les nobles inférieurs. Les rois disposent ainsi dans chaque village de leur domaine de maisons leur étant réservées.
Cette différenciation entre ari'i et gens du peuple se traduit également dans le langage. Les mots à utiliser quand on s’adresse à un ari'i peuvent être très différents de celle qu’on utilise envers un plébéien.
Voici quelques exemples de tabous liés à la personne royale :
- Le nom d’un ari’i maro’ura est tabou dans son domaine. Cela signifie que si le roi s’appelle “grand bateau” (va’a nui), il devient interdit de prononcer le mot va’a et il faut trouver un autre mot correspondant dans la langue commune.
- On ne salue pas l’ari’i maro ‘ura en disant “Ia Ora !”, comme à tout le monde. On lui dit “Maeva !”.
- L’ari’i maro’ura doit le moins souvent possible toucher des terres noa. Il se déplace donc sur les épaules de porteurs professionnels.
- Au passage de l’ari’i régnant, tous doivent se découvrir les épaules en signe de respect.
La classe des chefs est aussi une classe de guerriers et les membres des branches cadettes et les frères puînés du souverain (quand ils ne sont pas prêtres) servent souvent de troupe d'élite. La plupart des prêtres et des chefs ‘arioi sont issus de la classe des ari'i. Le grand prêtre d’un royaume, le tahu'a rahi, et le chef ‘arioi d’une île ont d’ailleurs presqu’autant de pouvoir que le roi.
La petite noblesse : les Ra’atira
Les ari'i sont relayés par une classe intermédiaire. Elle gère les affaires courantes n’étant pas de la dignité d'un chef. Cette classe est aussi une classe de propriétaires terriens qui travaillent ou font travailler leurs terres. Ces petits nobles servent également de troupes lors des conflits. Ce sont les ra'atira.
Les ra’atira fournissent les serviteurs "d'élite" des ari'i : orateurs, généalogistes, porteurs et même valets de confiance. De nombreux artisans sont également issus de cette classe.
On peut citer un signe distinctif des ra’atira : ils sont les seuls à porter des vêtements de feuilles tressées en sus du tapa.
Les prêtres et les artisans : les Tahu’a
Le rapport existant entre un prêtre et un artisan ne saute pas aux yeux : pour les maohis, ce rapport est évident. Ils sont des spécialistes dans leur domaine : pour les prêtres celui des connaissances mythiques, des prières et des invocations, pour les artisans celui de leur artisanat. En outre, les chefs-artisans sont investis d’un rôle religieux : ils se doivent de connaître les prières et les bénédictions nécessaires à leur activité et font respecter les tabous inhérents à leur métier.
Les prêtres sont en général issus de la classe des ari'i. Ils ont un pouvoir immense car ils calment la colère des dieux et amènent les bénédictions. Concrètement, ils édictent les tabous, décident des sacrifices (en particulier humains) et peuvent lancer des malédictions qui se traduisent souvent par la mort de la victime.
En dehors des marae (temples) de notoriété "internationale", le culte n'est pas dirigé vers un seul Dieu et les prêtres sont rarement consacrés à un Dieu particulier.

L'accès à la prêtrise demande une longue initiation. Cette initiation consiste en l'apprentissage des mythes, des prières et des généalogies qui doivent pouvoir être récités par cœur pour accéder au rang de tahu'a pure (prêtre). On appelle d'ailleurs les apprentis prêtres des haere te po (qui marchent la nuit) car on les voit souvent la nuit arpenter les environs des marae, récitant des généalogies ou des mythes afin de les mémoriser. Selon leurs connaissances et leur rang de naissance, les tahu'a pure sont ensuite classés dans un système hiérarchisé.
Les prêtres disposent d'assistants qui peuvent être recrutés dans les classes inférieures. L'exemple le plus significatif est celui des Opu-Nui, choisis pour la noirceur de leur peau et qui sont chargés du nettoyage des marae. Les opu-nui ont l'insigne avantage de ne pouvoir être les cibles des sacrifices humains car ils sont sous la protection de la déesse Hina. Les tahu’a pure sont également assistés par des muhu, apprentis prêtres ou assistants de la classe des ra’atira.
Les prêtres sont si sacrés qu'ils sont soumis à un grand nombre de tabous afin d'éviter qu'ils soient au contact de choses non-sacrées.
Etre artisan montre qu'on est favorisé des Dieux, qu'on a des dons, c'est un signe de Mana. Les artisanats les plus vénérés sont pour les tahitiens le tatouage et la construction de bateaux. Les sages sont considérés comme des artisans, ils sont les spécialistes des sciences et de
Les chamanes (orou) reçoivent souvent une considération égale à celle dont jouissent les artisans. Ils traitent avec tous les petits dieux et esprits dont les prêtres ne s’occupent pas. Ils sont généralement attachés à un marae et peuvent s’occuper des exorcismes et des envoûtements. Les sorciers sont des orou indépendants qui utilisent leurs pouvoirs à mauvais escient et à des fins personnelles.
Le peuple : les manahune
Les gens du peuple (manahune) ne sont ni des esclaves, ni des serfs. Ils n'appartiennent pas à leur seigneur. Ils jouissent d'une certaine liberté et certaines familles possèdent des terres. Les manahune composent la masse des pêcheurs, des serviteurs et des agriculteurs.
Ils sont soumis à de nombreux tabous qui sont là pour le bien de la communauté : ils évitent la colère des dieux et le contact entre ce qui est noa (profane) et ce qui est ra’a (sacré). Le ra’a peut amener mort et maladie au peuple, noa de nature. Parmi ces tabous, citons que certaines nourritures leur sont interdites, qu’ils n’ont pas accès à l’esplanade du marae ou qu’ils ne doivent pas toucher un ari’i de haut rang.
Les manahune sont contraints d’apporter nourriture et offrandes à l’ari’i rahi à des dates précises ou à sa demande. De même, leur aide peut être requise pour des travaux (construction de bâtiments, travaux agricoles…). Ils sont donc soumis à des formes d’impôt et de corvée.
Les victimes des sacrifices humains sont généralement « pêchées » dans leur rang.
Les manahune peuvent s’élever en devenant ‘arioi ou artisans ou encore en servant les ari’i.
Les esclaves : les Titi
Les esclaves sont peu nombreux dans l’archipel maohi, ils sont en général des prisonniers de guerre. S'ils ne servent pas dans les suites immédiates du conflit à alimenter les besoins en sacrifices humains, ils sont bien traités et leur statut correspond à celui des manahune. Leurs enfants sont adoptés par la communauté et ne sont plus considérés comme esclaves.
Les ‘arioi
Les 'arioi sont des conteurs, des danseurs, des bouffons et des baladins tatoués et errants. On leur prête le pouvoir d'améliorer la fécondité et
Dans chaque district, un grand fare (maison) leur est réservé. Ils y sont nourris par la population. Ils présentent leur spectacle, les upaupa. Tout leur y est permis, même de railler les ari´i.
Les ‘arioi ont également la plus totale liberté sexuelle mais ils n´ont pas le droit d´enfanter. Leurs enfants sont donc tués à la naissance. Ils ont le droit de se marier et deviennent alors des maris (ou des femmes) très jaloux (ses). La règle de l’infanticide ne s’applique pas aux dirigeants.
Les ‘arioi sont bien plus qu'une bande de bardes errants et dépravés : ils se trouvent sous la protection du dieu ’oro, dieu de la guerre, et ils en véhiculent le culte. Ils peuvent d´ailleurs eux-mêmes faire la guerre. Selon la légende, les ’arioi sont un cadeau de ’oro à ses deux frères ‘urutetefa et ‘orotetefa, les patrons de la secte. Ce culte originaire de Havai’i (actuelle Raiatea dans l’archipel maohi) était en passe, à l'arrivée des Européens, de supplanter en importance celui de tous les autres dieux dans l’archipel maohi.
La société des 'arioi semble au départ avoir été ouverte aux seuls ari’i puis aux élèves baladins les plus doués indifféremment des classes. Elle a évolué en une société à huit grades dont les grades supérieurs sont réservés aux ari'i. Le centre de la secte se situe à Opoa dans l´île de Havai´i. Ils s’y regroupent une fois par an à partir de mai puis se déplacent pour donner leurs spectacles à partir de novembre au moment du mûrissement du fruit de l’arbre à pain, l’uru.
Il existe un chef ‘arioi pour chaque île et pour chaque district (mataiena’a). Les membres sont recrutés dans toutes les classes de la société quel que soit leur sexe et passent pour cela une sorte d´examen où ils doivent entrer en transe (état nevaneva) et faire preuve de leur talent artistique et oratoire. L’arioi reçoit un nouveau nom pour son accession dans la société.
Il faut montrer sa valeur pour atteindre les degrés suivants. Il y a huit degrés auxquels se rajoutent les statuts d´apprenti et d´arioi fixe.
Chaque degré a ses propres tatouages qui se superposent sur les tatouages précédents et qui différent de ceux des ari´i.

Aux îles Paumotu, le principe de la secte de baladins existe également. Ils sont appelés Karioi. Les karioi ont un rôle moins religieux et constituent une transition vers l’âge adulte pour beaucoup de jeunes gens. On ne reste d’ailleurs Karioi que dans la jeunesse.
Une autre division fondamentale de la société tahitienne se situe entre hommes et femmes. Les femmes sont considérées comme inférieures et leur sont réservées les tâches pénibles de l'agriculture et de la fabrication du tapa. Elles n'ont pas le droit de participer aux cérémonies religieuses sauf dans de rares exceptions. Leur présence souillerait le marae. Elles ne peuvent boire le 'ava, la boisson sacrée. Elles ne participent pas non plus à la pêche hauturière.
Les femmes ne prennent pas leur repas avec les hommes en-dehors des grands festins. Certaines nourritures leur sont interdites et elles mangent rarement du porc. Leur nourriture est gardée à l’écart de celle des hommes.
Cependant, les femmes des classes ari'i peuvent accéder au pouvoir comme les hommes : elles sont ‘ari’i avant d’être femme. Elles participent même, si elles le désirent, aux combats. L'histoire des archipels est parsemée de reines guerrières.
La famille tahitienne ne correspond pas à la famille comme on l'entend en Occident. La conception de la famille est beaucoup plus étendue. Elle comprend toute les personnes qui sont apparentées de près ou de loin. Le don d'enfants dans une même famille est par exemple très répandu. La terre est une possession familiale légitimée par la présence d'un marae familial. La famille a souvent un dieu ou un ancêtre protecteur qu'elle vénère. La famille étendue est l'unité de base de la société tahitienne.
L´appartenance territoriale
Dans les îles hautes, la division politique de base est la vallée. Un ari'i rahi domine une vallée et les conflits ou les querelles se font d´une vallée à une autre. Ces divisions territoriales sont appelées mataiena’a. Dans les îles coralliennes, un chef règne la plupart du temps sur toute une île.
Parfois des confédérations de mataiena’a se forment et se combattent les unes les autres aboutissant au règne d´un seul roi. Cela s´est fait très tardivement à Tahiti (après l’arrivée des européens).

Il est peu aisé de parler des mœurs des tahitiens anciens par manque de témoignages fiables. En effet, ils ont été décrits par les missionnaires qui ne les comprenaient que partiellement. Ils se sont surtout appesantis sur leurs défauts du point de vue chrétien, afin de montrer les bienfaits de leur conversion au christianisme. On peut cependant en tirer quelques éléments d’après ces descriptions et les mœurs actuelles dans les îles.
Religiosité
Les tahitiens sont tout d’abord très religieux et accordent une grande importance aux tabous (tapu). Les dieux, les esprits et tout ce qui est ra’a influent sur la vie de façon constante et inspirent la terreur. Le respect des tabous, la magie, le culte servent à se protéger et parfois à utiliser ces pouvoirs à des fins personnelles.
Un personnage sans respect pour les tabous est bien plus dangereux qu’un voleur ou même un assassin car il met en danger toute la communauté en courrouçant esprits et dieux et en polluant les êtres noa. Les dieux doivent cependant répondre aux demandes de leurs fidèles, et les maohis n’hésitent pas à abandonner le culte d’un dieu et à déplumer son to’o (sorte de statuette) si celui-ci semble impuissant à satisfaire les désirs de la communauté.
La mort et la morale
Donner la mort ne pose généralement aux tahitiens aucune difficulté d’ordre moral. Les maohis aiment la guerre qui a rang d’institution. Les enfants, cependant, s’ils ne sont pas tués à la naissance, sont sacrés et adulés. Pratiquement tout leur est permis jusqu’à l’âge adulte. Par contre, les vieillards et les malades ne bénéficient d’aucune commisération. Les âmes des morts rejoignent le Po, le monde souterrain, triste et morne. Des exceptions existent cependant, les âmes peuvent venir hanter les vivants sous forme d’oromatua (fantômes qui inspirent la terreur aux maohis) ou accéder au paradis des riches et des ‘arioi, le rohutu-noanoa. Son dieu, Romi-tane, y laisse une place à ceux qui lui ont fait des offrandes somptuaires de son vivant. L’accès à une vie future meilleure ne dépend donc pas d’une conduite morale. La tradition, les sentiments et les tabous remplacent la morale. La vengeance ou la réparation sont souvent la seule punition à des actes de violence ou de vol.
L’insouciance
L’insouciance des maohis a frappé les premiers explorateurs. Les tahitiens ne semblent pas se soucier particulièrement de la richesse, du travail, de la discipline... Ils changent également souvent d’attitude, d’état d’esprit, de désirs, de conjoints et même de noms. Les valeurs tahitiennes diffèrent des valeurs occidentales. Les mœurs sont un mélange de laisser-vivre et de règles strictes.
Courage et ruse
Si les maohis peuvent être capables de grands exploits physiques, ils peuvent également tomber dans des périodes de paresse et d’indolence dont rien ne peut les tirer, le fiu. La ruse est beaucoup plus considérée que le courage ou la vaillance. La moquerie est d’ailleurs une seconde nature pour beaucoup de tahitiens et les exploits des farceurs constituent des sujets de légendes.
En guise d’illustration du tempérament tahitien, voici un petit extrait du chant de création de l’homme :
“ ... Lorsque les humains se multiplièrent, les troubles commencèrent ; les troubles firent naître la sagesse ; la sagesse fit naître la ruse ; la ruse fit naître la raillerie... ”

La Sexualité
Une grande liberté sexuelle caractérise la vie des tahitiens. Le sexe est une chose naturelle et la séduction fait partie du quotidien. Le dieu de la beauté, Tane, n’est-il pas l’un des dieux les plus importants de Tahiti ? Cependant, une fois marié, la jalousie peut être un frein à la débauche. Chez les ari'i, les hommes peuvent avoir plusieurs femmes, mais les vahine ari’i sont astreintes à plus de tenue. L’homosexualité et la bisexualité sont courantes et certains hommes prennent les vêtements et le statut de femmes dans la société.
Les différents rangs au sein de la société ‘arioi
Les poo sont les novices, ils sont acceptés s’ils sont pris d’un état nevaneva et s’ils ont font montre d’un talent de comédien.
Après leur initiation et une fête tenue par leurs parents, les poo deviennent membres du premier rang, le Taru-tatu (en maohi : épine pointue). Les tatouages de ce rang sont des petites marques dans le creux des genoux. Les jeunes ‘arioi s´ornent alors de feuilles de barringtonia rouges et jaunes.
Lors des spectacles upaupa, les ‘arioi de bas rang se couvrent le corps de noir avec du charbon de bois et le visage de rouge.
Le deuxième rang s´appelle ohe-mara (en maohi : tambour mur). Leur tatouage distinctif est un cercle autour de la cheville.
Le troisième rang s´appelle atoro (en maohi : rayure). Leur tatouage est une ligne sur le flanc gauche. Ils ajoutent à leurs vêtements des feuilles de bananier jaunes.
Le quatrième ordre s´appelle hua (en maohi : petit) et leur tatouage distinctif se compose de deux et trois points sur chaque épaule. Ils portent une ceinture de fibre de coco au-dessus de leur maro (pagne) et une coiffe de feuilles.
Le cinquième rang est le rang otiore (en maohi : inachevé). Leur tatouage spécifique couvre les mains, les bras et les épaules. Ils portent des guirlandes et des couronnes faites d´une liane jaune, le tainoa.
Le sixième rang, le taputu (en maohi : entassé) a un tatouage fait de courbes et de lignes droites partant du bas du dos jusqu´au milieu du dos. Ils portent les mêmes ornements que les otiore mais faits avec des feuilles d´opuhi (gingembre).
Le septième rang s´appelle harotea (en maohi: dessin léger). Une croix est tatouée de leurs aisselles jusqu´au-devant de leur ventre. Ils portent des ornements similaires aux taputu mais faits de feuilles de Ti.
Le huitième rang est celui des ‘arioi maro´ura (en maohi : ‘arioi à la ceinture rouge ou ‘arioi royaux). Leurs jambes sont tatouées et portent des imitations burlesques de vêtements royaux. Leur nombre est limité et ils ne sortent que du rang des ari´i.

Chaque passage de rang donne lieu à une cérémonie où les promus sont tatoués.
Les ‘arioi fau fenua sont des ‘arioi retirés.
Les ‘arioi fanaunau sont des ‘arioi qui ont été exclus. Honte à eux !
Les ‘arioi papa-tea (en maohi : corps clair) ou ‘arioi fixes organisent la venue des ‘arioi dans leurs districts.
Les maohis se distinguent entre eux par la profession qu’ils exercent. Certaines professions sont réservées à certaines classes sociales (prêtre, généalogiste, pilote…), d’autres sont ouvertes à tous (artisan, ‘arioi…), il « suffit » d’être doté d’un mana suffisant. Beaucoup de maohis, cependant, n’ont pas d’occupation fixe : un jour il cultive, un jour il pêche dans le lagon, un jour il flâne… Pour les besoins du jeu, ces maohis seront classés dans l’occupation la plus fréquente.
Les occupations sont ici classées par ordre alphabétique (français).
Baladin errant (‘arioi)
La société 'arioi décrite préalablement regroupe des baladins hiérarchisés en huit rangs. A la belle saison, ils se regroupent pour s’éparpiller ensuite dans l’archipel pour donner des spectacles. Ils sont spécialistes du chant, de la danse, des mimes, des pitreries, de la musique et du sexe. Placés sous la protection de ‘oro, ils sont nourris par la population à l’occasion de ces représentations et peuvent se moquer de qui ils veulent. Il leur est interdit d’avoir des enfants.
Chef de pêche (Tahu’a tautai)
Les tahu'a tautai dirigent l'organisation de la pêche. Ils en fixent le calendrier, façonnent des hameçons et vouent un culte aux esprits et aux dieux de l'océan afin de protéger les pêcheurs et leur assurer de bonnes prises.
Constructeur de cases (Tahu’a fare)
Les tahu'a fare dirigent et organisent la fabrication des maisons et des grands bâtiments tels les fare 'arioi et les hangars à bateaux.

Constructeur de pirogue (Tahu’a va’a)
Les tahu'a va'a sont les artisans les plus respectés car ils président à la fabrication des bateaux de toute sorte. Ils savent fabriquer les voiles, les cordes, nouer les planches de la coque et rendre les bateaux rapides et sûrs. Ils sont également capables de choisir les arbres les plus adéquats pour la construction et parcourent pour cela Tahiti en tous sens. Certains lorgnent avec envie sur les arbres de lieux tapu...
Constructeur de temples (Tahu’a marae)
Les tahu'a marae dirigent la construction des marae et sont donc experts dans la taille, le choix et l'assemblage de pierres. Ils connaissent les prières et les tabous associés à cette tâche éminemment sacrée.
Femme au foyer (Vahine)
Cette occupation regroupe les travaux généralement dévolus aux femmes : tâches ménagères et agriculture. Certains hommes pensent être nés du mauvais sexe et ils peuvent choisir cette occupation. Ils sont généralement homosexuels.
Fermier
Les fermiers cultivent la terre et s'occupent de ramasser noix de coco et fruits de l’arbre à pain. Ils fournissent à la communauté une grande part de ses ressources alimentaires. La propriété de la terre est familiale. Les fermiers ra'atira peuvent posséder des étendues de terre importantes (à l'échelle de Tahiti).
Guerrier (Toa ou Aito)
Les guerriers constituent les troupes d'élite en temps de guerre. En temps de paix, ils sont utilisés comme garde personnel, patrouille des frontières, porteur ou ils vaquent à d'autres occupations. Les fau sont des guerriers renommés qui portent à la bataille le fau, un énorme casque.

Héraut, Généalogiste ('orero ou Haere te po)
Les 'orero sont des orateurs spécialisés dans les généalogies. Ils sont généralement attachés à un ari'i et sont chargés de déclamer son identité et de prouver généalogiquement sa supériorité. On les appelle parfois Haere te po (comme certains apprentis prêtres) car ils marchent la nuit pour apprendre les généalogies des ari'i.
Médecin (Tahu'a Ra'au)
Les tahu'a ra'au sont des médecins. Ils savent soigner les blessures et nombre d'entre eux apprennent à réaliser des exorcismes, car la maladie est généralement causée par des esprits malveillants. Les tahu'a ra'au disposent de marae dédiés aux différents dieux guérisseurs et y officient comme de quasi-prêtres.
Navigateur
Les navigateurs sont les marins, hommes de bord des grands bateaux d'expédition. Ils possèdent souvent leur propre petite embarcation côtière. L'appel du large les tenaille et ils aiment le grand océan.
Orateur (Rau-ti)
Les rau-ti sont des orateurs professionnels qui servent des ari'i ou des ra'atira importants. Ils sont chargés de faire passer des messages dans la population et de convaincre certaines personnes. A la guerre, ils sont chargés d'exciter les guerriers. Leur habillement de cérémonie est un pagne de feuille de ti et une arme insidieuse, le dard de raie.

Orneur de tapa
Les orneurs de tapas sont chargés d'habiller les to'o, les statues recevant les dieux. Ils sont les rares hommes à travailler le tapa. Ils exercent leur talent à proximité des grands marae dans des fare destinés à cet usage.
Pêcheur
Les pêcheurs constituent un groupe social qui dispose de ses propres marae et de son propre chef, le tahu'a tautai. Ils amènent à la collectivité une part importante de sa nourriture et, bien qu’ils soient généralement manahune, ils sont respectés pour cela.
Pilote (Fa'atere)
Les pilotes dirigent les bateaux de haute mer lors d'expéditions maritimes. Leur science de la navigation et leur connaissance de l’océan sont primordiales à l'orientation des bateaux.
Prêtre (Tahu’a Pure)
Les prêtres dirigent le culte, édictent les tabous et exercent leurs talents de divination. Ce sont eux qui établissent et font respecter les tabous qui constituent les seules lois inviolables des maohis. Ils sont également soumis à de nombreux tabous du fait de leur ra'a important.
Prêtre Apprenti ou Assistant (Muhu)
Devenir prêtre demandant un long apprentissage, les marae sont peuplés d’apprentis issus des hautes classes.

Les assistants des prêtres, également appelés muhu, ne sont pas appelés à devenir prêtre et sont soumis à moins de tabous.
Sage (Tahu’a parau tomu fenua)
Les tahu'a parau tomu fenua sont les gardiens des traditions et des connaissances des maohis. Nombre d'entre eux enseignent dans des écoles que suivent les jeunes ari'i et quelques ra'atira. Les ari'i rahi les consultent parfois avant de prendre des décisions importantes.
Sculpteur
Les sculpteurs sont des artisans chargés de produire des objets courants et de leur donner un aspect esthétique. Ces objets peuvent être des 'umete (bols), des armes, des to'o (statues des dieux), des ti'i (statuettes d’esprit), des appui-nuque... Ils travaillent principalement le bois, mais aussi l'os et la pierre.
Serviteur du marae (Opu-nui)
Les opu-nui (littéralement « gros ventres ») sont des serviteurs attachés à un marae. Ils sont chargés de le nettoyer, de s'occuper des animaux et des plantes sacrés qui y vivent, de porter les offrandes et de biens d'autres services encore. Ils sont soumis à des tabous quand ils sont en service : ils ne peuvent partager leur repas avec d'autres gens, ils ne peuvent avoir de relations sexuelles avec quelqu'un de noa... Cependant, ces tabous disparaissent hors de l'enceinte du marae après une petite cérémonie de purification. Les opu-nui sont des gens du peuple (manahune) choisis par les prêtres pour la noirceur de leur peau. Ils deviennent alors protégés par la déesse Hine et ne peuvent être sacrifiés.
Valet (Teuteu)
Cette occupation regroupe l’ensemble des tâches au service d’un ari’i : porteur, homme ou femme de confiance, serviteurs… Ce sont généralement de jeunes gens de la classe des ra’atira. Comme insigne de leur fonction, ils portent une cape de plumes noires.